Depuis 2021, plusieurs inspections ont été menées par les services de l’Etat au sein du méthaniseur de la SAS ÉNERGIE MARTELLE à Enfonvelle (52) au titre du contrôle des installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE). Ces contrôles ont révélé d’importantes irrégularités environnementales et sanitaires. Pourtant, aucun de ces rapports n’a été publié par l’administration, alors même qu’ils auraient dû l’être en application du droit à l’information environnementale.
Un silence prolongé et injustifié des services de l’État en Haute-Marne a permis de tenir ces faits à l’écart de l’attention du public, sans doute pour ne pas freiner le développement d’une filière déjà fragilisée nationalement.
Nous publions aujourd’hui l’intégralité de ces documents. Leur obtention a été rendue possible grâce à la démarche de l’un de nos adhérents, qui a engagé une procédure juridique afin de contester le refus illégal de communication opposé par la Direction départementale de l’emploi, du travail, des solidarités et de la protection des populations (DDETSPP).
Ce que contiennent les rapports d’inspection
Voici un aperçu des irrégularités constatées lors de l’inspection du 13 août 2021 :
- Rejets d’effluents dans la nature, en raison d’un silo d’ensilage non étanche ;
- Débordement d’une fosse de 8000 L, avec déversement vers un puits d’infiltration d’eaux pluviales ;
- Mélange de digestat et d’aliments pour animaux, une pratique formellement interdite par le règlement européen 142/2011, en raison du risque de contamination du troupeau.
Ces irrégularités ont entraîné un avertissement officiel, avec menace de mise en demeure préfectorale et de transmission au procureur.
Ce n’est qu’à la suite d’une nouvelle inspection en août 2022, soit plus d’un an plus tard, que l’administration a constaté que certaines non-conformités (étanchéité du silo, débordement de la fosse) avaient été entièrement corrigées. L’irrégularité concernant le digestat mélangé aux aliments, quant à elle, avait cessé.
Ces faits illustrent clairement les dérives du modèle de développement aveugle des méthaniseurs dans le sud de la Haute-Marne. Alors même que certaines unités existantes peinent à respecter les normes minimales de sécurité environnementale et sanitaire, les projets continuent de se multiplier. Il est urgent de mettre un terme à cette opacité et à cette logique de croissance industrielle inconsidérée.
➡️ Consulter les rapports d’inspection complets et les mises en demeure.
La culture du secret, ça suffit!
La transparence administrative est un droit fondamental, garanti par la loi, et non une option. En matière d’installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE), les obligations de publicité et d’accès à l’information sont claires, encadrées par le droit national comme par le droit européen, notamment la Convention d’Aarhus. Pourtant, certains documents, en particulier ceux révélant des irrégularités, demeurent encore trop souvent inaccessibles. Cette rétention, comme celle pratiquée par la DDETSPP de la Haute-Marne, constitue un manquement grave aux principes de transparence, traduisant une culture préoccupante du secret.
SOS Pays de l’Apance imposera systématiquement la communication des rapports d’inspection non publiés, assortie cette fois de requêtes indemnitaires.

Restons concentrés sur les vrais enjeux et les vrais responsables
Nous voulons ici souligner que nous ne remettons pas en cause le droit d’un agriculteur à développer une activité de méthanisation. Il en a le droit, comme tout exploitant, et il a d’ailleurs procédé aux régularisations demandées. Mais ce sont les conditions dans lesquelles ces installations sont autorisées et encadrées qui posent problème. Le silence de l’administration, l’opacité infondée des rapports, le manque de moyens consacrés au contrôle des ICPE, la densification excessive des méthaniseurs d’ampleur industrielle, tout cela relève d’une politique de développement industriel précipitée et déconnectée du terrain, largement pilotée par les préfets et une extrême minorité de décideurs politiques. C’est donc vers eux que doit se tourner l’interpellation citoyenne. L’exploitant, lui, ne saurait être tenu pour bouc émissaire d’un système mal pensé.