Un projet hors-sol de moins ! Par une décision du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne en date du 1er février 2024, la Com’com des Savoir-faire vient d’être contrainte jeudi 14 mars d’annuler le projet d’assainissement collectif qu’elle souhaitait mettre en oeuvre.

L’affaire avait débuté en décembre 2021, quand la Com’com avait voté le déploiement de ce projet au terme d’une enquête publique. Son objectif était de respecter la loi sur les milieux aquatiques du 30 décembre 2006 et autres dispositifs juridiques imposant aux collectivités compétentes de contrôler la mise aux normes des assainissements individuels ou à défaut de délimiter les zones où elles assurent la collecte, l’épuration et le rejet des eaux usées domestiques. Car pour l’heure, les eaux grises et eaux vannes des habitants, chargées d’azote et divers polluants, sont toujours rejetées dans des fossés publics qui communiquent indirectement avec l’Apance. Une situation qui ne peut évidemment durer.

Rejets d’eaux usées et pluviales dans un fossé à Arnoncourt-sur-Apance en mars 2024

Un scénario d’assainissement mal choisi

Un habitant a saisi le tribunal en février 2022 pour contester le projet d’assainissement collectif, estimant à raison que son coût était excessif comparé à celui d’un scénario de mise en conformité des assainissements individuels. L’assainissement collectif aurait ainsi coûté à chaque foyer le double du prix d’un assainissement individuel dernier cri de type filière compacte. Soit un surcoût de 12 000 euros à la charge de la population, pour chaque habitation !

Alertée de ce problème de coût par les habitants dès le stade de l’enquête publique, la Com’com avait fi de leurs remarques. Le commissaire-enquêteur Bernard Roret, qui défendait lui aussi l’assainissement collectif, avait quant à lui déclaré dans ses conclusions que son coût n’était « pas primordial étant donné la situation du village en tête du bassin Rhône-Méditerranée-Corse ». Des arguments dont le tribunal a souligné l’absence d’intérêt perceptible puisque les deux modes d’assainissement présentaient en l’espèce les mêmes qualités environnementales, comme en attestent les rapports du bureau d’étude annexés à l’avis d’enquête publique.

“Erreur manifeste d’appréciation”

Dans ses attendus, le tribunal estime donc que le projet d’assainissement collectif voté par les élus était entaché d’une « erreur manifeste d’appréciation » en raison de son coût élevé pour une si petite commune.

Au conseil communautaire du 14 mars 2024, les élus de la Com’com ont ainsi été contraints de rectifier le tir à la demande du juge : un zonage d’assainissement non-collectif a été adopté à l’unanimité pour l’ensemble du territoire communal, en remplacement du collectif. La Com’com s’engage également à rembourser les taxes sur l’assainissement collectif prélevées aux habitants du village depuis le 1er janvier 2022, soit près de 3000 euros.

Ni le maire de Larivière-Arnoncourt Gilles Collin (qui était favorable au scénario de l’assainissement collectif), ni le maire délégué d’Arnoncourt Alain Nicolas n’ont pris part au vote de cette décision modificative. Et pour cause, ils n’étaient ni présents ni représentés ce jour-là au conseil communautaire…

Cette nouvelle décision de la Com’com est de toute évidence une excellente nouvelle. Si la mise en conformité des systèmes d’assainissement est bien une obligation légale dont le respect contribue à la protection de la bonne qualité des eaux superficielles, elle ne doit en aucun cas être envisagée dans des conditions qui pourraient faire peser une charge excessive sur les habitants lorsque cela peut être évité.

Une leçon de démocratie

Nous invitons les élus à prendre désormais en considération l’avis de la population lors des enquêtes publiques et concertations, surtout lorsque les observations des habitants sont parfaitement fondées. En privilégiant la réflexion collective, la Com’com aurait pu s’épargner le coût d’un contentieux, d’autant que la population était très consciente des enjeux environnementaux de cette mise en conformité. Au-delà des frais de défense qu’elle a elle-même dû engager, la Com’com est aujourd’hui condamnée par le tribunal à rembourser les honoraires d’avocat exposés par le requérant.